Vivre une vie extrême No.38 - Journaux intimes de Monsieur Yamano
Mardi 16 avril 2002
Hier j'ai changé d'habits. Des chemises à manches longues et des pantalons, j'en ai consigné contre les habits d'été, un polo à manches courtes et un culot. On sera en été plus tôt que d'habitude cette année.
Mercredi 17 avril 2002
Maria m'a rendu visite à dix heures quarante du matin. Il pleuvait. Chose rare, puisque l'on s'attend toujours à un beau temps avec elle. Cela faisait trois semaines que nous ne nous sommes pas vus, à cause, entre autres, de la visite de sa soeur ainée. Tant de choses à discuter, cela nous a fait parler avec précipitation.
Le service de la septième division criminelle de la Cour régionale d'Osaka m'a fait parvenir une "demande d'avis" pour la deuxième fois. Le juge et le procureur ont changé ce mois d'avril. Le nouveau procureur me faisait savoir qu'il avait trouvé une erreur dans la "demande d'avis" que son prédécesseur m'avait envoyé. Sans importance. Lui s'est trompé à son tour dans son document sur un point que je ne manquerai pas de lui signaler dans mon "avis." D'après lui, la preuve neuve sur laquelle j'ai basé mon appel pour la réouverture de mon procès était celle dont la première instance avait tenu en ompte. Ce qui est contraire à la vérité. Il n'avait qu'à relire les documents du procès. Je soumettrai mon "avis" avant le 16 mai.
Jeudi 18 avril 2002
J'ai feuilleté des revues rares, livres, pamphlets, livrets d'inspiration chrétienne, journaux, que Maria m'avait apportés hier. Des photos des membres de mon groupe de soutien qui se réunissaient le 20 mars dans la région de Kansai. Je vois pour la première fois les photos de Monsieur M., qui est venu rejoindre le groupe de la part de la paroisse d'Imaichi. Il a l'air d'un curé. Je tiens à remercier Maman S. pour les photos et la restauration dont elle s'est occupée. Je suis reconnaissant de tout mon coeur à tous ceux qui se sont réunis au meeting.
Dimanche 21 avril 2002
Aujourd'hui les membres de Kyushu auront une réunion à Nagasaki. Que les participants soient nombreux et les débats fructueux. J'ai prié.
"L'abolition de la peine de mort? Euh, voilà un sujet bien délicat !" C'est ce que l'on entend souvent parler. Ne prenez pas le mot "délicat" pour "impossible", ni "épineux", ni "Mieux vaut ne pas y toucher", ni "Y penser ne sert à rien", autant de prises de position négatives. "Allons-y, même si c'est difficile." Voilà une attitude positive que j'aime bien.
Lundi 22 avril 2002
Mon frère cadet m'a rendu visite vers deux heures de l'après-midi. Cela faisait longtemps que nous ne nous sommes pas vus. Madame S. et Monsieur Y. de Kobe avaient bien voulu l'accompagner, jusqu'à l'entrée du centre de détention. Il a été fort dommage que je ne pusse pas les voir, empêchés par un règlement qui veut qu'un condamné à mort ne voie personne si ce nfest ses proches parents. Une mesure absurde. Je me sens pourtant fortement encouragé par leur déplacement jusqu'ici. Je leur suis reconnaissant. Avec mon frère, j'ai parlé de l'état de ma santé et de l'avocat qui a pris en charge mon dossier.
Mercredi 24 avril 2002
Maria m'a rendu visite peu après dix heures du matin. Mon deuxième fils qui habite à Yokohama avait changé de travail le 1er avril. Il est revenu à la maison dans laquelle il avait appris son métier, et qui l'avait invité cette fois.
Vers deux heures et demi de l'après-midi, le père M. m'a rendu visite. Il m'avait prévenu qu'il viendrait me voir pour célébrer la messe de Pâques le 26 avril, mais il a anticipé sa visite. Le 24 mai, il viendra célébrer une messe pour l'anniversaire de mon baptême. Je suis très impatient de le voir.
Vendredi 3 mai 2002
Au beau milieu de la "semaine dorée." Dans le centre de détention, quatre jours chômés de suite. Aucune occasion de sortir de ma cellule, aucune correspondance, aucun transfert d'effets personnels. Comme dans une boite de conserve. J'ai pourtant tant de choses à faire et ne m'ennuie pas: lire, écrire, faire des recherches, prier, méditer, contempler. Une bonne occasion pour me concentrer. Il faut dire néanmoins que le traitement inhumain qui consiste à nous enfermer dans nos cellules de deux "tatami" [voir note] chacune, et ne rien faire pour nous, que l'administration de la maison applique aux détenus, augmente le stress.
Note : un espace équivalent à 3,24 mètres carrés.
Mardi 7 mai 2002
Je viens d'envoyer mon deuxième avis concernant mon appel de la réouverture de mon procès à mon avocat, Me N., qui le transmettra à la Cour régionale d'Osaka, la septième division criminelle. Quant à la preuve neuve que j'avais présentée lors de mon appel, le procureur m'a indiqué qu'il ne s'agissait pas de preuve neuve, puisque le tribunal en avait tenu compte au cours du procès original. Il est clair pourtant que l'on ne l'avait jamais examinée dans la première instance, ni dans la deuxième, ni à la Cour Suprême. Il est donc évident qu'elle constitue une preuve neuve. Voilà ce que j'ai démontré dans mon avis. Peu après dix heures, Maria m'a rendu visite. Elle ne parle pas spontanément, et c'est donc moi qui lui pose des questions, et elle de me répondre. Des échanges sont réduits au minimum, ce qui m'empêche de me rendre compte de ce qui se passe à l'extérieur.
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